L’initiative « Pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes » prévoit la mise en place d’un impôt temporaire de solidarité sur la part des fortunes imposables qui dépasse 3 millions de francs, afin de permettre aux collectivités de faire face aux conséquences de la crise sur la population.
La pauvreté augmente
Ces inégalités se sont creusées au cours des 20 dernières années, notamment à cause de l’augmentation des primes d’assurance maladie, des loyers et de la TVA, alors que les salaires n’ont pas suivi. Elles ont encore été exacerbées par la crise sanitaire et sociale de grande ampleur que nous traversons depuis le début de l’année 2020. Alors que les grandes fortunes n’ont pas souffert de la crise – voire, pour certaines, en sont ressorties renforcées – la pauvreté n’a quant à elle jamais été aussi présente dans notre canton. Le nombre de bénéficiaires de l’aide sociale a fortement augmenté et la durée de prise en charge de ceux et celles-ci s’est allongée. De plus en plus de personnes doivent faire appel aux subsides pour payer leurs primes d’assurance maladie. Des ménages s’endettent pour continuer à payer leurs factures alors que leurs revenus ont fondu. Le chômage a augmenté, en particulier chez les jeunes. Rappelons encore que les élèves en difficultés ont très fortement souffert de la fermeture des écoles et que des milliers de personnes ont dû faire appel à l’aide alimentaire offerte par le tissu associatif pour nourrir leur famille. Selon l’OCSTAT, le risque de pauvreté touche 18.5% de la population à Genève, alors qu’il est de 15.7% en moyenne en Suisse.
Des décennies de cadeaux fiscaux
Aux effets de la crise viennent s’ajouter les effets des baisses successives d’impôts, dont la RFFA n’était que le point d’orgue. Ces vingt dernières années, les Genevois-es ont dû avaler nombre de couleuvres, sous forme de cadeaux fiscaux faits aux plus riches et aux entreprises. La suppression de l’impôt sur les successions, du droit des pauvres, l’augmentation de la déductibilité des donations, ou encore les réformes de l’imposition des entreprises RIE2 et RFFA, n’en sont que des exemples.
Ces baisses d’impôts successives et systématiques font perdre des milliards aux collectivités publiques, qui n’ont plus les moyens d’offrir des services à la population en quantité suffisante : il n’est qu’à voir les milliers de places en crèche qui manquent, et les nombreux services qui sont débordés par les demandes et n’ont pas les effectifs suffisants. Frappés par ces baisses d’impôts, État et Ville de Genève s’en prennent également aux mécanismes salariaux de leur personnel.
Un système d’imposition profondément injuste qui épargne les plus riches
Dans un système solidaire, il est normal que les plus hauts revenus et les grandes fortunes contribuent plus que les revenus modestes et les personnes sans fortune. Toutefois, les barèmes fiscaux sont progressifs surtout pour les classes moyennes, et épargnent les très riches : pour l’impôt sur la fortune, le barème n’augmente plus au-delà de 3.3 millions. Pour les revenus, c’est à partir de 760'000 CHF qu’il n’augmente plus. Sans parler des niches fiscales et du « bouclier fiscal » qui a été offert aux super-riches. A l’échelle des millionnaires, il n’y a plus aucune progressivité. Les super-riches sont épargné-e-s et choyé-e-s par le système d’imposition genevois. Cette progressivité est pratiquement annulée par les autres contributions publiques et sociales que sont la TVA, les primes d’assurances sociales et surtout maladie, ce qui fait qu’au final un-e contribuable à petits moyens paie proportionnellement autant qu’un-e contribuable à gros moyens.
Notre initiative vise à réinstaurer un peu plus de justice fiscale et sociale dans ce système.
Notre proposition : un impôt solidaire et temporaire
Notre initiative propose d’instaurer un impôt de solidarité limité dans le temps (10 ans) sur les très grandes fortunes. Il s’agit d’un impôt de 2.5 pour mille (0.25%, pouvant aller jusqu’à 0.5% selon les communes en fonction du centime additionnel) sur la part de la fortune imposable supérieure à 3 millions de francs. A titre d’exemple, pour quelqu’un disposant d’une fortune de 5 millions, le supplément sera d’environ 9000 francs.
En outre, elle réduit les manques à gagner dus au « bouclier fiscal », qui permet aux très grosses fortunes d’échapper à une partie de l’impôt et qui fait actuellement perdre 173 millions de francs à l’État et 40 millions aux communes (chiffres de 2018). Actuellement, un rendement théorique de 1% de la fortune nette est pris en compte pour le bouclier fiscal. Afin d’éviter que ce mécanisme ne minimise les effets de l’initiative, le rendement net minimum pris en compte passe de 1% à 2%.
Enfin, afin de ne pas pénaliser les petit-es propriétaires et les artisan-es, nous avons prévu de tripler le montant des déductions sociales sur la fortune. Cette initiative renforce de ce fait le principe de progressivité de l’impôt tel que le prévoit notamment l’initiative « Zéro pertes » acceptée par le peuple en septembre 2020.
Que prévoit l'initiative ?
Les fortunes imposables de plus de 3 millions paieront une contribution de solidarité de 2.5 pour mille (5 pour mille environ selon les communes avec les centimes additionnels).
Pour le bouclier fiscal, qui bénéficie à de très grandes fortunes, le rendement net minimum passe de 1% à 2% afin d'éviter qu'elles échappent à cette contribution.
Les déductions sociales sur la fortune sont triplées pour favoriser les contribuables propriétaires de leur logement et se situant au bas de l'échelle des fortunes.
Pour les indépendants dont la fortune est investie dans leur entreprise, la déduction passe de 500'000.- fr. à 1,5 million.
La contribution de solidarité est prévue pour dix ans.
Elle pourra rapporter environ 200 millions au canton et 50 millions aux communes.
Sortir dignement et solidairement de cette crise en renforçant les services publics
Les collectivités sont en déficit, alors même que les services publics ont besoin d’être renforcées, surtout avec la crise actuelle. Quand la droite propose de faire de la fonction publique une variable d’ajustement en supprimant des postes à tout-va et en attaquant ses conditions de travail, nous proposons au contraire de reconnaître le rôle essentiel de la fonction publique et renforcer les prestations, afin de répondre aux besoins engendrés par cette crise. Renforcer les prestations, cela signifie renforcer la situation des salarié-e-s du secteur privé, qui ont besoin de ces prestations publiques pour survivre : crèches, écoles, aide à domicile, EMS, EPH, subsides sociaux, etc. Un service public fort profite à toutes et tous les salarié-e-s et pas uniquement aux employé-e-s de la fonction publique. Il est donc essentiel de trouver de nouvelles sources de revenus plutôt que de chercher à raboter des services déjà sous tension et surexploités. Aller chercher l’argent là où il y en a, et dégager de nouvelles recettes fiscales qui permettront à notre canton de sortir solidairement et dignement de cette crise.
Un petit geste pour quelques un-e-s … des effets importants pour la majorité
Le faible effort que consentiront les plus grandes fortunes de notre canton bénéficiera à toute la population. Cette initiative devrait rapporter environ 200 millions de francs supplémentaires à l’État et 50 millions de francs aux communes. Des recettes indispensables non seulement au maintien et au développement des prestations, mais qui permettront également de réaliser les investissements nécessaires qui aideront notre canton à répondre à l’urgence climatique.
Quelles différences entre l’initiative 99% et l’initiative fiscale cantonale ?
Alors que la gauche vient de perdre sur l’initiative 99%, il est normal de se poser la question de la pertinence de lancer une initiative fiscale dans la foulée de cet échec. Or ces deux initiatives sont différentes en bien des points. L’initiative 99% visait à taxer les revenus du capital. Elle n’était pas formulée et pouvait laisser penser qu’une large latitude était possible dans sa mise en œuvre. À l’inverse, notre initiative, qui s’applique au niveau cantonal, est formulée et précise, et ne laisse aucune place à l’incertitude. C’est l’impôt sur la fortune, et non sur le revenu, qui est temporairement augmenté. Les mécanismes proposés sont en plus temporaires et ne présentent aucun risque de voir les grandes fortunes fuir, comme cela a été reproché aux initiant-es de l’IN 99%. L’initiative cantonale instaure en outre des mécanismes permettant d’augmenter les déductions sociales, et évite ainsi de pénaliser les petites fortunes ou les petit-e-s propriétaires, notamment les PME.